Enfances

Leurs grosses pattes m’assaillent

Et pour qu’on me lâche… je braille,

Le nez collé au siège haut si haut,

Un pied sur le barreau,

Un genou plié brassant l’air !

Ils sont tous là à braire

Stupides, les bras ballants.

Je prends mon élan !

Pleine d’espoir,

Pour la gloire…

Je me hisse

Et glisse !

Leurs rires gras me raillent !

Entre mes quenottes, un brin de paille :

Trophée de tabouret !

Je les hais !

Sur le carrelage ;

C’est de mon âge !

Je m’affale et m’étale

Comme une pâte à tarte et j’ai mal.

Ce sont des géants,

Des dévoreurs d’enfants !

Au loup ! au loup !

A l’assaut de mon cou,

Des gueules béantes !

Je sens langues outrageantes

Et souffles chauds.

C’en est trop !

Sous la touffe humide

De leurs aisselles fétides,

Ils m’étouffent d’areu bouzou bouzou .

Postillonne un bisou mou

Sur mon front de terreur.

Ce ne sont que des adultes qui m’écœurent.

Ouf ! un sale mauvais rêve en fait !

Intestines

 

excrétés décrétés punkcrétés mou moi nous mix-

-ture de noyau de boyaux ou noeud nus indéterminés suce-pets mais mais mais

mais en tout cas noyés mais en trous cras crachés ravalés déclassés en tartines et odeurs

deeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee...

                                  MERDE

un tube dire quelque chose bien sentir faire sortir ce serait un succès déjà

deux tubes chante c'est l'amour deux tubes qui communiquent d'un bout l'autre c'est toujours

ça de pris ça de mis ça assez pour se trahir assez pour se déculo... déculo... d... d... d... découvrir assez pour faire construire y fleurir y mourir

faire et défaire un

                                     NOUS

Et oublier ce détail :

JE animal

TU animal

ILS, CEUX-LÀ, EUX animals ou -maux

même en sachant pour soi même en voulant pas ça

voir et avec les yeux faire de ilsceux-làeux des

bêtes justes bonnes à faire des

                                      SOMMES

bien rondes, bien blondes, appétissante comme la tome ou l'atome, crochues cornues comme des cornues, où faire bouillir tripes et aloyaux, avec yeux bien sûr, sang de vierge presque vrai, vin de verge presque vieux, faire bouillir surtout pechblende et huile de roche cueillies un minuit de pleine brune et malaxer avec les bouts de doigts de fossoyeurs restés collés au fond, bien agiter, laisser reposer, et leur faire boire jusqu'à la lie  

afin qu'ils tombent  

                                       TOUS

amoureux

à en crever en collectif

après n'avoir vécu que pour soi-même

au bout du compte c'est une libération. Au bout du compte c'est une évacuation. Au bout du compte c'est  arriver à quelque chose, aboutir à quelque chose, régler enfin quelque chose. S'abrutir à quelque chose. Et au bout du comte ça pue et c'est de l'autre, mais ça pue et c'est de toi aussi, ça passe par toi, ça prend forme de toi, ça prend sens de toi. Ne pense pas à tous les

                                         MORTS

ça aussi, valait la peine.

Absorber, expulser, absorber, expulser, absorber, expulser, manger, manger, manger, des choses qui ont déjà un peu cette odeur, des aliments de pauvres dont on ne regarde pas les dents, des mots des mondes des étiquettes des dates limites des idées bien moulées sur chiffres détaillés, des engrais pour univers futurs ou cancers des boyaux, des boyaux de dernier curé pour noble en manque de crédibilité, des futurs pour boyaux de mines et d'atomes concassés, deux ou trois livres presque lus et citations presque restituées, et beaucoup, beaucoup, de solitude et de méditation.

...

Etienne Mora